Historique du Prieuré
Les pages histoire ont été réalisées par le collectif Alcabez Patricia, Bécheau Anne, Bourgès Audivert Monique
Le prieuré de Redon- Espic : entre mystère et réalité
Le prieuré de Redon-Espic est sans doute le monument religieux le plus énigmatique du Périgord Noir. Cela fait longtemps qu’il suscite les interrogations et les interprétations les plus folles parfois.
L’église fut inscrite au titre des monuments historiques en 1948 et classée le 31 décembre 1999. Si sa fondation interroge encore nombre de chercheurs, l'identité de ses propriétaires au XIXe siècle reste tout aussi obscure. Restaurée en 2007, l’église vient de faire l'objet d'une nouvelle réfection de la toiture, achevée en 2017.
Situation géographique
Le prieuré de Redon-Espic est aujourd’hui isolé dans un massif forestier situé à l’est de la commune de Castels. Il se trouve à une altitude de près de 200 m. A proximité une ferme importante est qualifiée de repaire au XVIIe siècle. Le prieuré a été établi près des sources du Moulant, un ruisseau qui se jette dans la Dordogne quelques kilomètres plus à l’ouest. Près d'une d'elles un petit oratoire a été édifié dans le vallon.
Le toponyme de Redon-Espic pourrait se traduire par les « broussailles rompues » et appartenir à la catégorie des toponymes de défrichements ou par « l'éperon rond » expression qui décrit son emplacement sur le rocher.
Création du prieuré
Des fouilles archéologiques menées par le cabinet Hadès en 2006 ont permis de dater l’église du dernier quart du XIIe siècle et ont déterminé qu’une occupation des bâtiments attenants s’est faite du XIIIe au XVIe siècle.
A défaut d’archives concernant la création du prieuré, force est de se rabattre sur quelques éléments chronologiques plus ou moins exploitables. Redon-Espic ne figure pas parmi les possessions du monastère bénédictin de Sarlat dans les bulles papales de 1153 et de 1170. Pourtant en 1321, peu de temps après la création du diocèse de Sarlat , le prieuré de Redon-Espic fut rattaché à celui-ci, d’après un document de 1327 établi lors d’une levée de subside pontifical. Jean de Roquecorn, premier évêque de Sarlat, organisant son chapitre, avait uni l’oratoire de Redon-Espic à l’office du prieur claustral.
En 1273, le meurtre de l’abbé Stapone dans l’église du monastère de Sarlat par une flèche tirée par des moines fait l’objet d’une enquête dans laquelle apparaît un certain G. de Redonespi. C’est la première fois que ce nom apparaît dans les archives. Le prieuré dut donc être fondé à la fin du XIIe siècle comme l’atteste l’étude archéologique menée par le cabinet Hadès. De plus, lors de la restauration de 2007 et du nettoyage des murs intérieurs, des traces de peinture plus ou moins importantes selon les endroits ont été découvertes. Ces peintures ont été datées de la fin du XIIe siècle par la restauratrice qui les a consolidées.
Les différentes hypothèses
Le mystère de la création de Redon-Espic reste entier. Plusieurs hypothèses ont été évoquées, la plupart à partir de l’architecture de l’église et des bâtiments attenants (austérité architecturale de l’église, chevet plat, voûte en berceau brisé...) et d’aucuns ont cherché des rapprochements avec différents ordres religieux.
a) L’hypothèse grandmontaine
C'est le cas de l’hypothèse grandmontaine. Mais rien, hormis des similitudes architecturales (triplet du chevet, deux niches du chœur avec lavabo, porte d’accès au cloître au sud, auvent de bois sur la moitié ouest du mur nord, plan du monastère) ne peut corroborer cette hypothèse. Ici le chevet est plat, alors que les églises grandmontaines ont dans la majorité des cas un chevet arrondi. Elles présentent une caractéristique récurrente : le décrochement de 0,30 à 0, 45 mètre de la nef à la rencontre de l’abside que l’on ne trouve pas à Redon-Espic.
b) L’hypothèse de la transformation en un monastère de femmes
Cette hypothèse tient à :
• une phrase de l'Abbé de Lespine, relevée par un quidam aux Archives Nationales et interprétée comme une affirmation: « Marie (De Beynac), religieuse à Fontevrault qu’on croit fondatrice du prieuré de Redon Espic diocèse de Sarlat».
• un écrit réalisé par Mme de Beaumont-Beynac vers 1870 qui explique que Marie de Beynac, religieuse de Fontevrault en 1537, fille de François de Beynac et de Françoise de Lamarthonie, aurait fondé le prieuré de Redon-Espic et que son gisant était encore dans l’église « Il ne reste plus de cette fondation que des ruines avec l’église encore en bon état dans laquelle on voit le tombeau de la fondatrice de la maison de Beynac sur lequel elle est représentée couchée de son long en habit de cœur ». Aujourd'hui on ne voit ni gisant, ni tombeau.
Nous n'avons trouvé aucune Marie de Beynac parmi les religieuses de Fontevrault à cette époque-là. Dès 1561 et au moins jusqu'au 17 juin 1566, un Pierre de Beynac était le doyen de la cathédrale de Sarlat ; doit-on faire un rapprochement avec le fait que Marie, une religieuse de sa famille, ait pu se trouver dans le prieuré à cette époque?
Il y a bien d’autres hypothèses!.
Le prieuré au cours des siècles
Nous l’avons vu plus haut, au XIVe siècle, Redon-Espic est un prieuré bénédictin.
XVe siècle
Le 14 février 1475, il est question du prieuré dans un « acte de reconnaissance des appartenances du village de Redon Espy ».
Et le 11 février 1492, un contrat de transaction est signé « ...entre le prieur et les habitants contenant le village de Redon Espy, ses appartenances et enclaves confrontées aux appartenances du village de la Fagette».
A la fin de 1492, il est question des habitants du village de Redon-Espic, ses appartenances et enclaves étant au prieur. Une reconnaissance générale du fief du prieur de Redon-Espic a lieu. Le prieuré est à la collation de l’évêque de Sarlat.
En 1542, la dame de La Tour, de La Roque des Péagers, administratrice de Gabriel de Beynac « arrente un bois aux appartenances de Redon-Espic, paroisse de Castels, juridiction de La Roque, à Me Jacques Rochon et noble Catherine Miquelle».
XVIe siècle
En 1543, le prieuré appartient toujours à l’église cathédrale de Sarlat et est qualifié d’annexe. Les tenanciers Pierre dit Peyrichou et Aymar Segurels, frères, Jean Blanc, Jeanne Bru et Pierre dit Perriquet ainsi que d’autres exploitent le domaine sur lequel on cultive du blé, de l’avoine, du froment, du baillarge, du chanvre, du lin, de la vigne, des légumes et où l’on élève gélines, porcs, moutons, chèvres.
En 1554, un inventaire du prieuré est dressé car il a besoin de réparations.
Au XVIIe siècle, nous n’avons que peu d’information sur Redon-Espic, sauf le nom du prieur en 1609 qui est Louis de Carbonnières, sieur de la Mothe, en place aussi aussi en décembre 1684.
XVIIIe siècle
En 1703, Anne de Vigounes, veuve de M. Me Armand de Madroner (?), écuyer et avocat en la cour, fait une requête par le biais de son procureur César Dumonteil au sujet de la propriété foncière du domaine de Redon-Espic contre François de Cumon de La Dieudie, prêtre, docteur en théologie et doyen de l’église cathédrale de Sarlat, qui « prétend être seigneur foncier et direct dudit domaine » et qu’elle accuse d’avoir pris les blés et châtaignes du domaine entreposés dans le grenier de la maison du métayer. Elle propose de payer les rentes dues au doyen, raison pour laquelle le doyen a dû faire mettre la main sur ceux-ci. Le domaine de Redon-Espic est donc affermé à cette époque-là.
Le 28 décembre 1706, on trouve une « reconnaissance faite par Pierre Lafaysse, laboureur habitant au village de Baran, paroisse de Castel, à François de Cumon de Ladieudie, prêtre docteur en théologie, doyen de l’église cathédrale de la ville de Sarlat et prieur du prieuré de l’église de Redon-Espic, habitant de la ville dudit Sarlat, de possession de divers tènements situés dans la paroisse de Castel ».
Le 27 juillet 1722, Antoine Saintclar, prêtre, doyen de la cathédrale et vicaire général de l’évêque de Sarlat, succède à François Cumont de La Dieudie comme prieur de Redon-Espic. Il dit que les bâtiments du prieuré dépendant du doyenné sont entièrement ruinés, que l’église est en très mauvais état et que les héritiers de La Dieudie « sont teneus des reparations à faire a ladite esglise et du restablissement des bâstimants dépendant dudit prieuré », c’est la raison pour laquelle il se pourvoit devant le sénéchal du Périgord. Il demande de nommer un expert pour procéder à la visite de l’église et des bâtiments et de faire une estimation des réparations afin de condamner les héritiers du dernier prieur à « restablir lesdits bastiments en bon estat et aux reparations de ladite esglise ». Le 13 octobre, le procureur du roi nomme comme experts Michel Monméja, conseiller au siège de Sarlat, et Jean Vacquier fils, bourgeois, habitant de Sarlat. L’on sait que cette mission fut remplie et que le rapport fut remis au contrôleur général... mais il est dommage pour nous que ce document ne se trouve plus dans le dossier.
De 1733 à 1744 le doyen Pignol donne quittances à Gorsse des Milandes de la rente sur les tènements de l'oratoire et de Redon-Espic.
Le 29 juillet 1752, Raymond Delmon, charbonnier, habitant du village de Baran, consent une reconnaissance en faveur de M. Raymond de Pignol, prêtre, doyen du chapitre de Sarlat et prieur du prieuré de Redon-Espic, habitant de la ville de Sarlat, du fait perpétuel et fondalité de Redon-Espic.
Le 24 février 1754, après le décès de Raymond de Pignol, l'abbé Formigier de Beaupuy prend possession du doyenné de Sarlat et de ses appartenances et dépendances (dont fait partie Redon-Espic. Il s'agit d'un acte global, c'est pourquoi on ne trouve pas dans les archives de prise de possession concernant uniquement l'église de Redon-Espic).
En 1755, Jean-Baptiste de Formigier de Beaupuy, décrit un prieuré en mauvais état, ce qui ne nous surprend pas, les réparations n’ayant pas été faites : « déclarant en outre pour décharger toutes les parties que les masures et mauvaises murailles prêtes à crouler qui sont au-delà de la chapelle du côté du midi sont dépéries par vétusté ». On apprend dans ce document que l’évêque a ordonné la suppression de la chapelle de Redon-Espic. Jean-Baptiste de Formigier fait à son tour une requête pour que les réparations à faire soient évaluées et que ce soient les héritières de Raymond de Pignol qui les fassent. Deux experts sont à nouveau nommés : les sieurs Pierre Chaumel, notaire royal et Nicolas Varenne, bourgeois. Une expertise est réalisée en présence des héritières de Pignol...
Le 2 juillet 1774, l'abbé Formigier de Beaupuy afferme pour 9 ans les rentes du prieuré de Redon-Espic au notaire Graffeille habitant Saint-Cyprien. Parallèlement, le 11 septembre de la même année, Pierre Revaugier, avocat en parlement, habitant du bourg de Daglan, afferme le domaine de Redon-Espic à Léonard Combis, travailleur du village de La Gaugertie, Meyrals. On voit là que l’abbé, seigneur commandataire du prieuré, et le propriétaire du domaine, le sieur Revaugier, sont deux personnes différentes.
Le 26 juin 1779, Pierre Revaugier vend à Jean Chabannes, habitant du bourg de Beynac, deux domaines proches, Redon-Espic et Le Sécadou, paroisse de Castels, fief de Mr le doyen de Sarlat, moyennant 15 000 livres, savoir 13 800 livres pour les immeubles et 1200 livres pour le mobilier. Cet acte est passé devant Ramière notaire à Beynac dont les minutes ne sont pas déposées aux Archives Départementales.
En 1782, pour payer les arrérages de la rente foncière qu'elle devait au sieur Grafeille fermier de Redon-Espic, et les frais qu'il a engagé pour recouvrer cette somme, Anne Mariel de Sarlat, veuve de François Liabot, lui vend un pré compensé par la même somme de 167 livres.
En 1783, l'abbé Formigier de Beaupuy afferme pour 5 ans les rentes du prieuré de Redon-Espic au notaire Graffeille, habitant Saint-Cyprien, moyennant 270 livres par an. Le prieur meurt le 28 novembre 1783.
En 1784, Jean-Baptiste Chabanes, bourgeois habitant du lieu de la Redonde, paroisse de Bèzenac, voulant faciliter à son fils ( aussi prénommé Jean-Baptiste, actuellement au séminaire) l'accès à la vie cléricale, lui attribue la somme de 100 livres de revenu annuel pour lui servir de titre clérical, lequel revenu Chabanes père a assigné sur son entier domaine de Redon-Espic et ses dépendances.
En 1787, le 26 avril, à Urval, une reconnaissance de possession de diverses terres est faite par Pierre Lafaysse, laboureur, habitant du village de Baran, paroisse de Castel, à messire Jean-François de Montalembert, doyen du chapitre cathédral de Sarlat, y habitant, vicaire général du diocèse, prieur et seigneur de Redon Espic. Il meurt en 1792 à Toulouse où il était parti pour régler des affaires.
Que se passa-t-il au moment de la Révolution de 1789 ? Il n’existe aucune trace de vente de Redon-Espic en bien national aux archives départementales de la Dordogne.
XIXe siècle
En 1814, le lieu appartient à Antoine (ou Jean-Baptiste) Chabanne. Sur le cadastre napoléonien de la commune de Castels daté de 1832, seule l’église (parcelle B 1002) appartient à cette commune. Toutes les autres parcelles environnantes sont la propriété des héritiers de Jean-Baptiste Chabanne. Originaire de Millac Antoine Chabanne (1759-1814) géra à la fin du XVIIIe siècle les forges de Grolejac. Vers 1779, Antoine habitait le château de La Redonde, à Bézenac, qu'il avait acheté aux Beauroire de Lapeyre. Son père Jean-Baptiste Chabanne (1725-1800), sieur de la Grange devint en 1765 fermier des biens des Beynac et ce jusque vers 1800.
Pendant une longue période l’église sert de bergerie. Même si depuis 1856 la municipalité commence à se préoccuper de l’état de la toiture de l’église et déplore que M. Chabanne en ait la clé et qu’il s’en serve pour y entreposer des fagots. Le Conseil décide de récupérer la clé avant de commencer des travaux; il est toujours propriétaire des parcelles environnantes.
Le 10 novembre 1863, M. le Maire expose que, suivant convention faite devant M. le Juge de Paix, Monsieur Chabanne renonce aux droits qu’il pourrait avoir sur la chapelle de Redon-Espic, ainsi que sur le terrain porté comme communal qui se trouve près de cette chapelle sur la matrice cadastrale de Castels, ainsi qu’à la parcelle n° 1003 section B. Par reconnaissance, la commune de Castels prend l’engagement de faire dire annuellement par le curé de Castels une messe pour la famille Chabanne. Il est entendu qu’en cas de vacance, ladite église de Redon Espic restera la propriété de la commune de Castels. Le Conseil Municipal est d’avis que M. le Maire soit autorisé à établir les conventions. Un accord écrit signé par ses héritiers, daté du 26 août 1865, déclare qu’ils ont pris connaissance de la délibération de 1863, qu’ils y adhèrent et qu’ils l’acceptent sous réserve d’une messe annuelle en faveur de leur famille et de l’attribution à des fins de culte.
En 1876, Mlle Marie Chabanne, une des héritières, donne à titre de bail à moitié fruits à Jean Bailly, agriculteur demeurant à Redon-Espic, " le domaine de Redon-Espic consistant en bâtiments d'exploitation et d'habitation, terre labourable, pré, luzernière, châtaigneraie, taillis chênes, taillis chataignier et friches."
Visite architecturale
Extérieur des bâtiments
Dimensions extérieures de l’église: 20 X 9 (mètres).
Elle est disposée au nord du prieuré, simple et austère, en appareil régulier.
La toiture recouverte de lauzes posées directement sur la voûte (avant restauration, elle en était séparée par un lit de sable) s’amorce en décalage au-dessous du mur originel des pignons.
La porte des fidèles en arc brisé se situe à l’arrière de l’église sur le mur gouttereau nord, épaulé par quatre contreforts. Il présente des corbeaux pouvant avoir accueilli une charpente qui aurait vraisemblablement formé un portique destiné à abriter les fidèles avant leur entrée dans l’église. On remarque sur la gauche une petite baie en arc brisé.
Le chevet plat présente un triplet avec minces ouvertures à linteau arrondi et un oculus. A sa base on peut distinguer des petites croix gravées dans la pierre, qui signalent des sépultures. Des sondages effectués antérieurement à la restauration ont permis de localiser des tombes rupestres .
porte des fidèles en arc brisé | petite fenêtre nord et contreforts | chevet avec triplet et oculus |
Le mur gouttereau sud est flanqué de deux contreforts.
On remarque la porte des moines en arc brisé et à sa gauche un enfeu décoré d’une croix en peinture ocre de taille bien plus grande pouvant signaler la sépulture d’un personnage important.
Apparaissent nettement les amorces des murs du premier étage qui se développaient au-dessus du passage des moines, de la salle capitulaire et du cellier. Une petite fenêtre au niveau du premier étage pouvait permettre à un malade contagieux de suivre les offices sans être mêlé à l’assemblée.
Un passage voûté avec ouvertures en arcs brisés s’appuie contre ce mur. Il permettait d'aller de l’enclos au cimetière. Les fouilles ont révélé sept sépultures. (une huitième de forme trapézoïdale a été trouvée à l’intérieur des bâtiments conventuels dans l’aile orientale).
Des corbeaux et des boulins témoignent de la présence d’une galerie qui aurait pu courir autour de l’enclos sur les bâtiments du prieuré, aujourd’hui ruinés.
On distingue encore des départs de murs, après l’escalier du premier étage qui s’appuie sur le passage du cimetière, ils auraient pu délimiter à l’est la salle capitulaire (4,30 X 6, 50 m, destinée à une petite communauté), puis un cellier; au sud le réfectoire et la cuisine.
Il reste un seul chapiteau du cloître, décoré de feuilles d’eau, qui a été déposé à l’intérieur de l’église.
mur gouttereau sud avec enfeu | passage du cimetière | escalier montant à l'étage ruiné | salle capitulaire |
fenêtre des malades au 1er étage |
mur ouest avec une ouverture (murée) |
chapiteau du cloître | jardin du cloître |
Le pignon ouest à deux contreforts est percé d'une haute fenêtre en arc brisé et à large embrasure dominée par une archivolte décorée de billettes.
Un tore le coupe sur toute sa largeur entre fenêtre et contreforts.
Deux lignes de trous de boulins placés dans le bas du bâtiment suggèrent une implantation de charpente qu'on ne peut actuellement expliquer: y a-t-il eu là une passerelle permettant d'accéder au prieuré par ce côté en rattrapant la forte déclivité du terrain? Il semble y avoir eu une porte dans le mur ouest du prieuré, qui a été murée.
pignon ouest
Intérieur des bâtiments
Dimensions intérieures de l’église : 17 X 6 (mètres).
La voûte en berceau brisé reposant sur un cordon en quart de rond se prolonge sans discontinuité au-dessus du chœur. La nerf ne présente pas de décrochement latéral au niveau du chœur.
La double frise de fleurs bleu lapiz-lazuli, ocre, jaune décore le tore et le souligne. On la retrouve au-dessous du triplet, et de faible apparence en arc presque effacé au milieu de la voûte.
La petite baie du gouttereau nord ajoute un peu de lumière au chœur. Elle présente un ébrasement à base oblique lisse, comme le triplet voisin aux ouvertures en forme de meurtrières.
On ne sait à quoi pouvaient servir les corbeaux décorés de motifs géométriques ocres et jaunes placés de part et d’autre du chevet.
Le chœur surélevé indique l’ancien niveau du sol. On y accède par deux marches. En effet, après d’anciens travaux de restauration dommageables, le sol se trouve en soubassement: la porte des moines présente un escalier de trois marches rédentes permettant de descendre dans l’église, en témoignent les lavabos liturgiques, trop hauts à l’évidence pour les ablutions des desservants! La porte des fidèles, elle, ouvre de plein pied. A l’origine, le sol suivait la pente naturelle du terrain, s’élevant symboliquement vers le chœur (comme à l’abbatiale de Saint-Amand de Coly). Il y avait certainement un dallage, disparu comme la plupart des pierres du cloître, le lieu ayant servi de carrière.
peintures sur corbeau | armoire liturgique avec lavabo | grande baie ouest | oculus et arcs des triplets |
la porte des moines sud et ses 3 marches récentes |
porte des fidèles nord | fenêtre des malades au sud | petite fenêtre nord |
La fenêtre de l’ouest à large embrasure et quatre paliers à la base complète l’éclairage donné le triplet à l’autre bout du bâtiment. Un décor ocre borde le pignon, on retrouve ce même encadrement autour de l’oculus et des arcs du triplet.
La petite fenêtre du sud possède aussi à sa base une embrasure en paliers , comme la fenêtre du pignon Ouest. Elle permettait de suivre l'office depuis le premier étage sans avoir à descendre dans l'église.
Dans le mur sud on peut voir également les placards liturgiques pourvu d'un lavabo.
Dans l’épaisseur de la porte des fidèles, un trou de section 10 X 10 cm et de profondeur de 2 mètres aurait peut-être permis d'enfoncer une barre de bois ou de fer qui aurait servi à bloquer la porte.
Au pied du promontoire rocheux se remarquent les restes d’un vivier pavé de larges dalles (dans une propriété privée).
Liste des prieurs et doyens de Sarlat
Liste des doyens et des prieurs de Sarlat
En 1321, après la création du diocèse de Sarlat qui intervint en 1317, le prieuré de Redon-Espic lui fut rattaché, Jean de Roquecorn, premier évêque de Sarlat, organisant son chapitre avait uni l’oratoire de Redon-Espic à l’office du prieur claustral.
Cette liste a été dressée en 1635. Nous l’avons complétée (en vert) par des informations trouvées dans des documents cités dans les autres chapitres de notre histoire.
Prieurs
Helias de Rotis grand prieur du monastère de Sarlat en l’an 1301 et premier grand prieur de l’église cathédrale dudit Sarlat. Il a vécu au moins jusqu'en l’an 1322.
Reymond de Leyrac en 1324, 1331, 1334.
Guillaume de Chaillac en 1348
Arnaldus Regni en 1379
Archambaldus Lonvert en 1383
Guillaume de Lobestorn en 1388, 1399, 1406.
Joannes des Estrés en 1415
Joannes Lalande en 1444
Guillaume Griffoul en 1440, 1470.
Jean Griffoul vers 1482, grand prieur claustral de la cathédrale de Sarlat et prieur de Redon-Espic
Hugue de Nohales en 1486.
Bertrand de Roufignac abbé de Terrasson en 1495, 1500, 1504.
Jan de Massault de Clerens en 1506, 1514, 1516, 1535
Doyens
Pons de Salignac grand prieur et premier doyen de l’eglise cath. de Sarlat. (Cette ligne a été barrée sur le document)
Bertrand de Salignac en 1543, 1545, 1555, 1557
Pierre de Beynac en 1561, 1566
François de Crueil
Archambaut de Baille en 1580, 8 may 1581
Jan de Carbonieres de Jayac en 1582
Louis de Carbonieres de Jayac de La Mothe en 1609, 1635... 1684....
François Cumont de La Dieudie ...703...1706... à 1722.
Antoine de Saint Clar, de 1722 à ...
Raymond de Pignol, ...1733 à 1744...1752...1754.
Jean-Baptiste Formigier de Beaupuy, de 1754 à 1783 (+ le 28 novembre).
Jean-François de Montalembert ...1787...1792.
Le village de Redon-Espic
Le village de Redon-Espic
Plan Napoléon
La ferme actuelle située 80 mètres environ au-dessus du prieuré, porte tantôt le nom de repaire , tantôt de mas, tantôt de domaine.
Elle est appelée mas le 22 février 1543 dans un « extrait de la reconnaissance generale du village et appartenances de Redonspy entre Bertrand de Salignac religieux et grand prieur de l’esglize cathedrale de la ville et cité de Sarlat avec son annexe de Redonspy et Pierre dit Peyrichou et Aymar Segurel freres pour eux et leurs consorts pour une quarte partie comme tenanciers du mas de Redonspy quatre parties faizant le tout , Jean dit Jean Blanc , Jeanne Bru, Pierre dit Perriquet et autres ». On note qu’il y avait à cette époque un village à Redon Espic.
En 1609, la Cour condamne Jean Seilhade, Jean Raffy, Guilherme Fontalbe et autres, à venir prendre investiture et reconnaissance de noble Jean de Carbonnières de Jayac, doyen en l’ église cathédrale de Sarlat et prieur de Redon-Spy, pour ce qu’ils tiennent dans le tènement du Repaire, et à lui payer leur quote-part de huit « boyriques » et deux quartons d’avoine, argent dix sols, gélines deux et douze deniers d’acapte, de rente foncière et directe.
En 1670 mention est faite de François Teilhac « du village de Redon Espi ».
Le même en 1682, est qualifié de sieur Dalon, il habite le repaire de Redon-Espic au moins jusqu’en 1701. Dans une plainte en 1682 contre Etienne Gorsse, sa ferme est appelée repaire (« François Tilhac sieur Dalon habitant du repaire de Redonespic »). Ce bâtiment est décrit par Alain Blondel et François Le Nail: « L’édifice le plus important est une demeure construite en bel appareil sur caves voûtées. On entre à l’étage, en raison de la déclivité du terrain, par un portail de facture élégante, classique, dont le linteau, gravé des lettres S.M. (Sainte Marie) est daté de 1732, est surmonté d’un socle qui devait porter une statuette de la Vierge ».
En 1693, "François Teilhac, de son bon gré et volonté a confessé debvoir a messire Louys de Carboniere de Jayac ecuyer pretre doyen de l’eglise catedrale de Sarlat prieur du prioré de Redon Spicq illecq present et aceptant savoir est la somme de 166 livres 6 sols tournoys et se a cause d’arerages de rante dheues audit sieur doyen du tenement de Redon Spicq».
En 1709, la ferme est appelée domaine dans une supplique de dame Anne de Vigounès au sénéchal du Périgord. En 1717, elle est encore appelée domaine dans une afferme de Redon-Espic faite par le seigneur de Cussac à Pierre Bertrand : « L’an 1717 et le 3e du mois de fevrier en la ville de St Ciprien en Perigord apres midy regnant Louis par devant moy notaire royal soubsigné presants les temoins bas nommés a esté personnellement constitué Me Montheil sgr de Cussac ht du bourg de Cussac lequel de son bon gré et vollonté a affermé et baille a tiltre de bail a ferme a Pierre Bertrand marchant ht de la parroisse de Bègles pres Bordeaux icy presant et aceptant scavoir est le domaine appellé de Redon Espic et biens en depandant consistant en maisons, granges, terres labourables preds et bois de haute fustaye et taillis et coupe..... ».
En 1721, Pierre Bertrand, marchand, et Marie Borne habitent Redon-Espic . De même en 1746 y naît Marie Revaugier, fille d'Antoine et de Jeanne Bertrand puis ensuite 4 autres enfants. En 1727, mention est faite du village de Redon Espic dans une requête de l’archevêque contre Pierre Bertrand.
En 1744, il est question de la Maison Neuve de Redon-Espic, lieu de naissance de Peyrone Faure, fille d’Antoine et d’Anne Joucla.
En 1747, Antoine Revaugier est dit bourgeois au lieu de Redon-Espic. En 1779, sa maison est appelée domaine dans l'acte de "vente par Me Revaugier avocat en parlement du bourg de Daglan à Jean Chabannes sieur de La Grange, habitant du bourg de Beinat, de deux domaines à Redon Espic et Secadou paroisse de Castel, fief de Mr le doïen de Sarlat, moïennant quinze mille livres , savoir 13 800 livres pour les immeubles et 1200 livres pour le mobilier. Passé devant Ramière notaire à Beynat le 25 dudit an ».
Elle est aussi appelée domaine dans le titre clérical du sieur Chabanes du 13 novembre 1784 « ...que Chabanes a assigné sur son entier domaine de Redon Espic et ses dependances, situé dans la parroisse de Castel».
De nombreuses murailles et tas de pierres prouvent une occupation dispersée autour du site du prieuré. Nous avons relevé une vingtaine de familles depuis 1732 sur les registres paroissiaux. L’enregistrement des naissances, mariages, décès commence en janvier 1691 pour la paroisse de Castels, mais pendant 30 ans aucun ne concerne Redon-Espic.
Le pèlerinage
Le pélerinage
En mai 1814, la Vierge serait apparue dans le vallon de Redon-Espic, près de la source, à Jeanne (Marie) Grave, une jeune bergère de 15 ans qui gardait les moutons de M. Chabanne. La Vierge se serait plainte « amèrement de l’ingratitude des hommes pour son fils Jésus Christ et annonça de sa part de terribles fléaux si l’on n’observait pas mieux le repos du dimanche, et si les blasphèmes impies poursuivaient incessamment leur cours ».
Les parents de Jeanne Grave habitaient tout près, au Sécadou de Goudou. Jeanne reçoit le message marial et meurt le 24 novembre; peu de temps après ses parents décèdent, sa mère Anne Delpech, âgée de 40 ans, le 6 octobre et son père, âgé de 30 ans le 16 octobre ( Il est à noter que durant les six derniers mois de l’année 1814, en dehors des décès de la famille Grave, plusieurs décès de personnes jeunes sont enregistrés à la Fagette, au Sécadou de Goudou, mais aussi à Baran et à Finsac. S’agit-il d’une épidémie qui aurait frappé plusieurs familles en contact ? En tous cas il y eut cette année-là à Castels plus du double de décès que l’année suivante et l’année précédente). Quant à Antoine Chabanne, il meurt le 17 décembre à l’âge de 56 ans à Bézenac.
Plusieurs récits ont couru sur l’enterrement de la jeune Jeanne Grave. Ce jour-là, il pleuvait fort et seul son cercueil porté par la famille jusqu’au cimetière de Saint-Martin de Castel n’aurait pas été mouillé. Toujours est-il que durant les années qui suivirent cet événement, un pèlerinage se créa spontanément sur les lieux de l’apparition à tel point que les autorités religieuses finirent par autoriser en 1862 qu’une messe soit célébrée dans l’église de Redon-Espic, prélude à une reconnaissance du pèlerinage.
En 1878, une messe est célébrée sur le lieu de l’apparition mais elle semble avoir été précédée d’autres depuis près de 20 ans. A cette époque les bâtiments jouxtant l’église sont en ruine d’après l’auteur de l’article de la Semaine religieuse.
Le 27 septembre 1923 a lieu l'inauguration d’une statue de la Vierge à la source des apparitions.
Dans le livre de Jean-Louis Garrigue " Pierre Boissel (1872-1939), médecin et poète occitan", il est question d’une pièce écrite par le Dr Boissel « Jeanne la Pastourelle », sous-titrée « Le diable à Redon Espic ».